Sanctions du CNAPS contre une société de sécurité privée : rappels autour du juge administratif

3 février 2020

Une décision récente de la Cour administrative d'appel de Nantes (CAA Nantes, 10 janvier 2020,
N° 18NT01652) nous fournit l'occasion de quelques rappels utiles relatifs aux sanctions disciplinaires que le CNAPS (Conseil national des activités privées de sécurité) peut prononcer contre des sociétés de sécurité privée, et aux moyens et conditions de leur contestation.

Dans cette affaire, une entreprise de sécurité avait fait l'objet de contrôles de la part des agents de la Délégation territoriale Ouest du CNAPS, qui ont constaté un certains nombre de comportements illégaux, puis la Commission locale d'agrément et de contrôle Ouest (CLAC) a prononcé une interdiction temporaire d'exercer (ITE) toute activité constitutive d'une prestation de sécurité pendant un mois, ainsi qu'une pénalité financière d'un montant de 4000 euros, sur le fondement de l'article L 634-4 du Code de la sécurité intérieure.

La société de sécurité a contesté cette sanction en adressant un recours, dans le délai de deux mois prévu par les textes, à la Commission nationale d'agrément et de contrôle (CNAC) qui siège à Paris boulevard Poissonnière. En pratique, la CNAC doit réexaminer tout le dossier, envoyer une convocation au chef d'entreprise avec un nouveau rapport synthétisant l'analyse qui est faite des torts et premiers arguments en défense, recevoir et entendre le dirigeant assisté le cas échéant de son avocat, et prendre une nouvelle décision. Cette nouvelle décision remplace celle de la Commission locale.

Dans le cas traité par la Cour administrative d'appel de Nantes, la CNAC n'a pas répondu, son silence gardé plus de deux mois  a fait naître une décision "implicite de rejet" et cette décision non matérialisée par un écrit a été contestée devant le Tribunal administratif. La CNAC a finalement pris et envoyé une décision "expresse" qui a elle aussi remplacé la précédente, et c'est sur elle que le Tribunal s'est prononcé... pour rejeter les arguments de l'entreprise de sécurité.

Dans le délai de deux mois, cette dernière a "interjeté appel" du jugement, et soulevé un certain nombre de "moyens" - ses arguments - contre le jugement du Tribunal administratif.

La Cour y répond et nous éclaire donc à plusieurs titres. La société de sécurité a d'abord soutenu que la CLAC Ouest de Rennes n'avait pas le droit de la sanctionner, car les faits reprochés auraient été commis par un établissement situé dans une région qui lui échappait (c'est la compétence territoriale). La Cour rejette le moyen, car il s'agissait d'une seule et même société, dont le siège devait être comprise dans le ressort du CNAPS de Rennes.

La société de sécurité a également soutenu que les sanctions étaient disproportionnées, c'est-à-dire que la réalité et la gravité des manquements à la loi ne correspondaient pas à la sévérité excessive de l'administration. Il est exact que le CNAPS est obligé par la loi de proportionner ses sanctions à la réalité des faits. Les textes ne prévoient aucune échelle de sanction précise en fonction d'une nomenclature de fautes, mais seulement des plafonds (5 ans pour les ITE, 150 000 euros pour les pénalités financières). Il est donc difficile de définir ce qu'est une sanction proportionnée, et seule l'étude des décisions de justice telles que celle-ci permet de dégager des principes et des exemples. Dans cette affaire le juge administratif considère comme proportionnées l'ITE d'un mois et la pénalité de 4000 euros dans la mesure où le CNAPS a constaté :

- l'emploi de deux agents sans carte professionnelle

- l'affectation à des missions de sécurité de deux agents sans tenue comportant un élément d'identification de la société de sécurité

- L'absence de remise de carte matérialisée à quinze agents

- L'absence de remise du Code de déontologie des acteurs de la sécurité privée

- Le non respect de règles conventionnelles relatives au temps de travail des agents de sécurité

La Cour a aussi rejeté le moyen selon lequel les manquements n'étaient pas matériellement établis. Lorsqu'un tel argument est formulé, mieux vaut constituer un argumentaire solide et appuyé sur de nombreux justificatifs.





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